La rencontre avec le Christ

27, Jan 2023

Éditorial de Monseigneur Marc Aillet, évêque de Bayonne, Lescar et Oloron, à paraître dans la revue diocésaine “Notre Église” n° 144 de février 2023

Le temps ordinaire est constitué de ce que l’on appelait autrefois le temps après l’Epiphanie et le temps après la Pentecôte. En ce sens, on peut dire que le temps ordinaire est le temps de l’Eglise. L’Epiphanie et la Pentecôte ont ceci de commun qu’ils ont à voir avec la mission universelle de l’Eglise : les mages venus adorer le nouveau-né de la crèche représentent les Nations païennes « associées au même héritage, au même corps, au partage de la même promesse, dans le Christ Jésus, par l’annonce de l’Evangile » (Ep 3, 6) ; et l’effusion de l’Esprit Saint de la Pentecôte propulsera les apôtres sur les chemins de la mission, selon le mandat missionnaire du Christ : « Allez, de toutes les nations, faites des disciples… » (Mt 28, 19).

Le temps de l’Eglise, c’est donc le temps de la mission. C’est en effet la rencontre avec le Christ, qui nous communique l’Esprit Saint, qui est la source de la mission d’annoncer l’Evangile du Salut au monde d’aujourd’hui. Les Mages ont fait une rencontre bouleversante avec le Christ : ils s’attendaient à découvrir un Roi, dont ils avaient vu se lever l’étoile à l’Orient, capable de sauver le monde en perdition avec éclat et puissance. Contre toute attente, ils se prosternèrent devant un nouveau-né couché dans une mangeoire : transformés par cette rencontre de grâce, ils comprirent que celui qu’ils reconnaissaient comme Roi et Dieu, en lui offrant l’or et l’encens, sauverait le monde par l’amour, en se donnant tout entier en sacrifice pour la multitude, d’où la myrrhe. Ainsi, « Ils regagnèrent leur pays par un autre chemin » (Mt 2, 12), conscients que le Christ est seul capable de changer le cœur de l’homme et de lui donner la force de transformer l’histoire par l’amour. Combien de saints nous en ont donné le témoignage : le cœur transformé par sa rencontre avec le Christ, saint Vincent de Paul a contribué à éradiquer la pauvreté dans la France du XVII° s. par l’amour qu’il a déployé et qui lui a inspiré des œuvres gigantesques.

Depuis sa première encyclique, consacrée à l’amour, Deus Caritas est – Dieu est Amour (2005), le thème de la rencontre personnelle avec le Christ a été le fil conducteur de tout le pontificat de Benoit XVI, dont le programme est ainsi formulé dès les premières lignes de cette encyclique : « A l’origine du fait d’être chrétien, il n’y a pas une décision éthique ou une grande idée, mais il y a la rencontre avec un événement, une Personne qui donne à la vie un nouvel horizon et par là son orientation décisive » (n. 1). La foi chrétienne n’est pas un moralisme ni une doctrine, mais une rencontre avec une Personne qui est capable de transformer le cœur de l’homme en profondeur et ainsi de le rendre capable de témoigner de sa foi à travers sa vie donnée – une morale – et la parole proclamée – une doctrine de vérité.

Ne nous étonnons pas si l’Eglise est appelée, comme l’avait prophétisé Joseph Ratzinger en 1969, à se dépouiller de son apparente puissance et de ses structures, souvent lourdes, et à devenir très minoritaire, car le chrétien est d’abord quelqu’un qui a fait la rencontre avec le Christ et qui se laisse, jour après jour, transformer par sa grâce, jusqu’à être prêt à donner sa vie à cause de lui et de l’Evangile. Les prêtres doivent avoir bien à l’esprit que leur ministère ne consiste pas à remplir les églises mais à permettre à chacun de rencontrer vraiment le Christ et de se mettre en chemin pour en assumer les exigences dans sa vie. Je sais bien que nombre de fidèles n’ont pas toujours conscience de cette exigence et se perdent souvent en récriminations de toutes sortes et en discussions byzantines. Pendant ce temps-là, et ce, malgré les scandales qui abiment le corps de l’Eglise, on enregistre un nombre toujours croissant de catéchumènes et de recommençants qui frappent à la porte de l’Eglise. Je le comprends comme la réalisation de cette même prophétie de Joseph Ratzinger : « Les hommes évoluant dans un monde complètement planifié vont se retrouver extrêmement seuls. S’ils perdent totalement de vue Dieu, ils vont réellement ressentir l’horreur de leur pauvreté. Alors, ils verront le petit troupeau des croyants avec un regard nouveau. Ils le verront comme un espoir de quelque chose qui leur est aussi destiné, une réponse qu’ils avaient toujours secrètement cherchée ».

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