Présenté en Conseil des Ministres le 12 décembre dernier, le projet de loi visant à inscrire la liberté d’avorter dans la Constitution doit être soumis au vote des députés en janvier et des sénateurs en février, pour être définitivement adopté (à la majorité des 3/5èmes) par l’ensemble des parlementaires réunis en Congrès le 5 mars prochain.
Ce projet de loi, auquel le Président de la République¸ Emmanuel Macron, tient par-dessus tout, tant par idéologie que par démagogie politique, vise à consacrer, non le droit, mais la liberté d’avorter (ce qui revient en fait quasiment au même) alors qu’en France, la liberté de recourir à l’IVG n’est aucunement menacée. Depuis la loi Veil de 1975 (dont l’article 1er rappelait malgré tout que « la loi garantit le respect de tout être humain dès le commencement de la vie »), cette « liberté » n’a, au contraire, cessé d’être élargie : allongement du délai légal de l’IVG de 10 à 12 semaines en 2001 puis à 14 semaines en 2022, prise en charge intégrale par l’assurance maladie, abandon du délai de réflexion et des entretiens pré-IVG, y compris pour les mineures, suppression de toute référence à la situation de détresse de la femme en 2022, institution puis extension du « délit d’entrave à l’IVG », etc. En conséquence de quoi, le nombre d’avortements n’a jamais été aussi élevé qu’en 2022, avec plus de 234.000 IVG, tandis que le nombre de naissances ne cesse de diminuer…
L’IVG, une liberté ?
Les associations qui s’efforcent d’accompagner les femmes enceintes en difficulté et divers sondages témoignent au contraire que cette prétendue liberté de choix est illusoire puisqu’en réalité, la grande majorité des femmes qui recourent à l’avortement ne s’y résignent qu’en raison des difficultés économiques et financières auxquelles elles sont confrontées, ou des pressions plus ou moins contraignantes qu’elles subissent souvent, y compris de la part de leur entourage immédiat (conjoint, employeur, etc.), sans qu’aucune alternative ne leur soit proposée, et sans qu’aucune politique de prévention de l’avortement ne soit hélas envisagée. Nicolas Tardy-Joubert, président de la « Marche pour la Vie », a bien raison de souligner qu’en France, la seule liberté de la femme aujourd’hui menacée est celle de pouvoir garder son enfant…
Quelles conséquences ?
Le principal objectif des inspirateurs et des promoteurs de ce projet de loi est manifestement d’imposer à l’ensemble de la société leur conception des choses, à savoir que l’avortement est nécessairement un progrès, qu’il convient de rendre « irréversible » et absolument indiscutable, comme s’ils redoutaient, au fond d’eux-mêmes, qu’une partie de l’opinion ne finisse un jour par se souvenir ou par réaliser qu’un avortement est un « crime abominable » (cf. Gaudium et spes n° 51) qui consiste en l’élimination pure et simple d’un petit être humain et qui laisse par ailleurs la plupart des femmes dans un profond désarroi.
Clause de conscience
Il est donc impossible que cette constitutionnalisation, qui ferait en quelque sorte de l’avortement une valeur suprême de la République, ne débouche, à plus ou moins brève échéance, sur la remise en cause de la clause de conscience des médecins et infirmiers qui refusent de pratiquer des IVG. Il est également inévitable qu’elle ne finisse par menacer la liberté d’expression des personnes et des associations qui combattent l’avortement ou sa banalisation actuelle. Or, « cette défense de la vie à naître est intimement liée à la défense de tous les droits humains. Elle suppose la conviction qu’un être humain est toujours sacré (…) dans n’importe quelle situation et en toute phase de son développement. (…). Si cette conviction disparaît, il ne reste plus de fondements solides et permanents pour la défense des droits humains, qui seraient toujours sujets aux convenances contingentes des puissants du moment » (Pape François in La Joie de l’Evangile, n° 213).
Olivier Drapé (Académie diocésaine pour la Vie)
Une mobilisation de tous pour soutenir l’accueil de la vie
Le commandement biblique « Tu ne tueras pas » inscrit dans toutes les consciences, au-delà de celles des seuls croyants, signifie que tout être humain est confié à la sollicitude de tous les autres. Nous ne devons pas affaiblir la force d’un tel repère. Ces enfants à naître, nous en sommes d’une certaine façon tous responsables. Ainsi, le vrai progrès réside dans la mobilisation de tous, croyants et non-croyants, pour que l’accueil de la vie soit davantage aidé et soutenu. La vraie urgence est d’aider au moins les couples ou les femmes qui, aujourd’hui, n’ont pas réellement le choix et estiment ne pouvoir garder leur enfant en raison des contraintes sociales, économiques, familiales qui pèsent sur eux ou sur elles, et trop souvent sur les femmes seules.
Extrait de la déclaration des évêques de France, réunis à Lourdes en Assemblée plénière, le 7 novembre 2023.